Oui, la CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) est lourde et contraignante pour les entreprises, y compris les plus grandes. Non, il ne faut pas l’abandonner ou la diluer maintenant, car seules des informations accessibles, claires, compréhensibles, précises et comparables peuvent créer la confiance nécessaire pour faire face au défi des transitions.
Cette ambition essentielle n’est toutefois atteignable qu’à une condition : que nous cessions les arguties pseudo-juridiques et formelles pour nous concentrer sur ce qui compte vraiment, rendre l’information ESG transparente pour que nous puissions collectivement décider et agir en faveur de la durabilité sur la base de faits.
Dépasser la conformité
Trop de marchands du temple veulent faire de la CSRD une usine à gaz, lourde et coûteuse pour les entreprises, au détriment de son ambition réelle : accélérer le changement. Le reporting n’est pas une finalité, il doit être un levier de décision.
Pour qu’il en soit ainsi, publier des kilomètres de tableaux de données, sans structure, sans hiérarchie, sans narratif n’est pas possible. C’est le contraire même de la transparence, une surabondance d’information qui noierait le lecteur et qui nous ferait, encore, perdre du temps pour agir.
Si les auditeurs sont utiles pour assurer la sincérité des données fournies, ils ne doivent pas être les destinataires du rapport de durabilité. Ce sont les citoyens, les analystes, les investisseurs, les collaborateurs des entreprises qui devraient être les cibles prioritaires de ce rapport. Seulement, ils semblent parfois être les grands oubliés de la démarche. C’est à eux que nous devons parler, car ce sont eux qui vont agir aux côtés des entreprises.
Certaines d’entre elles en sont déjà convaincues, nous travaillons déjà avec elle pour mettre en avant les informations utiles, faire preuve de pédagogie et, in fine, penser véritablement aux lecteurs.
Simplifier, rationnaliser pour privilégier l’action
Pour libérer le potentiel de la CSRD (et le temps des équipes ESG, relations investisseurs et juridiques des entreprises), il est toutefois crucial de simplifier le processus de conception du rapport de durabilité idéal.
Là encore, remettons du bon sens dans les débats et les discussions. Pour être efficaces, les entreprises ont besoin de standards clairs, adaptés à leurs enjeux et à leurs contraintes. Moins de complexité, moins de technocratie, plus d’action.
Des modèles de rapports de durabilité existent déjà. Chefs d’entreprises, dirigeants, appuyez-vous dessus. Vous gagnerez du temps. Vous gagnerez de l’argent. Vous gagnerez en impact car ce modèle sera déjà partagé par vos pairs. Les premières publications en mars/avril 2025 vont agir comme un révélateur. Le juge de paix ne sera pas le consultant, mais l’investisseur ou l’analyste.
En adoptant un standard commun à toutes les entreprises, vous leur ferez également gagner du temps, vous renforcerez leur confiance.
Penser au dernier kilomètre
L’enjeu est précisément ici. Il ne suffit pas d’avoir des données correctes et bien structurées pour tirer le meilleur parti du potentiel de transformation de la CSRD. Il reste un dernier obstacle à franchir : rendre ces informations compréhensibles et engageantes pour le plus grand nombre. C’est ce que l’on pourrait appeler le « dernier kilomètre » de l’effort d’information. La production de données claires et pertinentes ne sert à rien si elles ne sont pas bien transmises, mises en contexte et interprétées de manière accessible pour les différentes parties prenantes.
Il est essentiel que les entreprises, en particulier celles soumises à la CSRD, ne se contentent pas de remplir des cases réglementaires, mais qu’elles prennent la responsabilité de rendre ces informations compréhensibles pour les investisseurs, les consommateurs et le grand public. Ce dernier kilomètre est décisif, car c’est là que la transparence prend tout son sens. Ce sont ces informations, interprétées et restituées de manière simple, qui permettent de fonder des décisions éclairées, de créer la confiance et d’amplifier l’impact des actions entreprises. C’est là que le pouvoir de la donnée se transforme en action.
Agir
Le temps de la complexité bureaucratique est révolu. À l’ère de la durabilité, la CSRD doit devenir un catalyseur de changement, pas un obstacle.
Il est donc impératif de dépasser la conformité, de simplifier et de rationaliser pour privilégier l’action, tout en n’oubliant pas ce dernier kilomètre : celui où les données prennent vie et deviennent compréhensibles pour tous. Ce chemin n’est pas facile, mais il est inéluctable. La CSRD, loin d’être un simple fardeau administratif, est l’opportunité de redéfinir la manière dont les entreprises mesurent et communiquent leur impact. Il est temps de rendre la durabilité accessible, simple, et véritablement transformative.
Ensemble, faisons de la durabilité une véritable boussole pour l’avenir.
– Laurent Rouyrès, Président de Labrador.