Reporting extra-financier, la difficile mise en place d’un cadre réglementaire aux États-Unis

Jeudi 23/06/2022

La Securities and Exchange Commission (SEC) a appelé le 21 mars dernier les entreprises américaines cotées à intégrer dans leur document de référence (10-K) différentes informations directement liées aux enjeux climatiques. Les parties prenantes avaient jusqu’au 17 juin pour remettre leur avis. À l’heure où la SEC commence tout juste à analyser ces retours, remonte déjà une certaine opposition et bon nombre se demande si la SEC ne sort pas ici de son domaine d’intervention.

Entretien avec Raquel Lizarraga, experte US Labrador, Relations investisseurs, Information ESG

Trois mois après l’appel de la SEC en faveur de la publication de différentes informations sur le climat, où en est-on du processus ?

La SEC analyse depuis quelques heures à peine les avis des parties prenantes. Mais s’il est toujours prévu qu’un premier cadre soit arrêté fin 2022, il y a quand même pas mal d’interrogations. Certains, et ils semblent être nombreux, se demandent si ce nouveau cadre entre bien dans les pouvoirs de la SEC.

Quel est le premier point d’achoppement ?

La première opposition concerne le Scope 3 de l’état des émissions de gaz à effet de serre. Les parties prenantes soulignent que cette collecte d’informations que les entreprises ne maîtrisent pas est très onéreuse et pas toujours fiable. Cette difficulté est prise en compte dans le calendrier prévu : une obligation de communiquer en 2024 sur les comptes 2023 de l’ensemble des informations climat pour les plus grandes entreprises, un an plus tard pour les autres. Pour ce qui est du Scope 3 des émissions de gaz à effet de serre, on décale d’un an pour tout le monde.

« Les entreprises américaines, de toutes tailles, n’ont pas attendu un cadre formel pour commencer à communiquer sur les sujets ESG »

En attendant, les États-Unis rattrapent leur retard sur l’information extra-financière ?

Ce n’est pas si simple que cela. Bien entendu, avec la DPEF, la taxinomie et la directive CSRD, l’Europe est en avance sur les aspects réglementaires. Mais aux États-Unis, c’est bien le marché, c’est-à-dire les investisseurs, qui veulent cette information et ils en redemandent. Les entreprises américaines, de toutes tailles, n’ont pas attendu un cadre formel pour commencer à communiquer sur les sujets ESG. Sur la base du volontariat, cela fait déjà plusieurs années que l’on voit de nombreuses communications autour des sujets climat ou sociaux. Et cette information est très détaillée et bien présentée ! Mais il manque, il est vrai, un cadre.

Quels sont les sujets les plus abordés à ce jour ?

Sur le chapitre Environnemental, les entreprises américaines abordent les sujets des impacts de leurs activités sur le climat et les énergies renouvelables, mais aussi la consommation de l’eau. Sur le chapitre Social, là aussi, les entreprises US vont assez loin avec une description précise du capital humain et des mesures prises pour assurer le développement des salariés au sein de l’entreprise, la sécurité au travail ou encore l’attractivité des talents. À savoir, toutes les entreprises américaines de plus de 100 salariés ont l’obligation de publier la répartition de leurs effectifs selon des critères parfois tabous de ce côté de l’Atlantique : race, groupes ethniques…

« Les rémunérations moins scrutées aux États-Unis qu’en Europe »

Et la Gouvernance ?

Pour ce chapitre-là, il n’y a rien de particulier demandé par le cadre réglementaire. Les rémunérations ou le concept du « Say on Pay », par exemple, sont requis par la loi, mais sont moins scrutés par les investisseurs aux États-Unis qu’en Europe.  Toutefois, ces informations sont incluses dans les rapports 10-K, ainsi que des informations relatives à la composition des conseils d’administration. De même, les bons rapports « ESG » lèvent le voile sur la gouvernance des sociétés.

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Beñat Caujolle

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