Notre webinaire « CSRD : les questions que tout le monde se pose – saison 2 » a suscité de nombreuses questions sur l’application concrète de la directive. Car nous n’avons pas pu tout aborder en une heure, voici les réponses des expert·es Labrador.
Au programme :
- Comment traiter les enjeux importants pour les investisseurs, mais non matériels pour l’entreprise, afin d’assurer la comparabilité des informations ?
- Les normes ESRS (European Sustainability Reporting Standards) doivent-elles apparaître de façon explicite dans le rapport pour faciliter la lecture ?
- Quels conseils donneriez-vous en priorité aux entreprises de la vague 2 ?
- Doit-on justifier pourquoi un enjeu n’est pas matériel dans notre rapport CSRD ?
- Les normes ESRS 2 Gov 1 à 5 manquent d’analyses et d’explications. Devons-nous les interpréter nous-mêmes ?
- Comment les entreprises peuvent-elles intégrer la gestion de leurs obligations Règlement européen pour la protection des données (RGPD) dans leur stratégie de conformité à la CSRD ?
- Que pensez-vous de la charge de travail pour traiter l’ensemble des points de données pour les entreprises ?
- Les normes ESRS peuvent être répétitives au sein d’un même ESRS. Selon vous, faut-il rédiger le rapport en répondant à chaque point de données individuellement ?
- L’entreprise définit-elle elle-même les objectifs de maîtrise des IRO matériels ?
- La France a transposé la CSRD plus rapidement que d’autres pays, comme l’Espagne ou l’Allemagne. Ne créé-t-on pas ainsi une pression supplémentaire sur nos entreprises ?
Vous pouvez également accéder au replay du webinaire, organisé le 12 décembre 2024, en présence de Éric Baudrier, Directeur général de la Haute Autorité de l’Audit (H2A), Pierre Constant, Associé Sustainability chez EY, Marc Boissonnet, Expert ESG/CSRD chez Labrador et Lorna Lucet, Directrice ESG chez Amundi PEF MidCap.
Comment traiter les enjeux importants pour les investisseurs, mais non matériels pour l’entreprise, afin d’assurer la comparabilité des informations ?
Vous pouvez expliquer les raisons de la non-matérialité des enjeux attendus en vous appuyant sur les caractéristiques spécifiques de la chaîne de valeur de votre entreprise. L’analyse de double matérialité étant un processus annuel, un enjeu pourrait devenir matériel du fait de son utilité pour la prise de décision de vos parties prenantes. Par exemple, le manque d’information sur un sujet spécifique pourrait engendrer une méfiance des investisseurs.
Les normes ESRS (European Sustainability Reporting Standards) doivent-elles apparaître de façon explicite dans le rapport pour faciliter la lecture ?
La nomenclature précise des ESRS facilite la recherche d’informations et le balisage XBRL. Nous recommandons de les expliciter en allant jusqu’aux exigences de publication (disclosure requirements ou DR). Il est en outre important de veiller à leur présentation. Concrètement, il s’agit d’utiliser le vocabulaire spécifique de la norme et de faire de chaque titre de DR matériel un titre de chapitre. Cette approche simplifie la lecture et l’accès à l’information.
Quels conseils donneriez-vous en priorité aux entreprises de la vague 2 ?
Les entreprises de la vague 2 sont les ETI qui dépassent 2 des 3 seuils suivants : 250 salariés ; 25 M€ pour le bilan ; 50 M€ pour le chiffre d’affaires.
Nous vous conseillons de suivre ces bonnes pratiques :
- Réalisez une analyse de double matérialité robuste en amont, car elle constitue le fondement du rapport. Partagez partager avec vos auditeurs dès que possible pour anticiper ses implications.
- Sensibilisez vos dirigeants aux enjeux de la CSRD et des ESRS, sans les alarmer.
- Anticipez le changement. Effectuez par exemple un exercice à blanc avec les données déjà disponibles.
- Échanger avec vos pairs.
- Adoptez une approche transversale de la CSRD. Intégrez notamment la direction financière et la direction des risques dès l’analyse de double matérialité.
- Inspirez-vous des rapports de la vague 1, en vous appuyant notamment sur notre outil de benchmark autonome, Explore. Comparez les IRO (Impact, Risque, Opportunité) IRO matériels utilisés dans votre secteur.
- Acceptez que nous sommes sur un chemin d’apprentissage collectif.
- Faites appel à un consultant expérimenté pour gagner du temps et éviter de mauvaises interprétations des exigences de la CSRD.
Doit-on justifier pourquoi un enjeu n’est pas matériel dans notre rapport CSRD ?
L’obligation de justification concerne uniquement les enjeux climatiques. Nous conseillons de créer un tableau synthétique des enjeux non matériels accompagnés chacun d’une courte explication, par exemple : “Non applicable compte tenu de notre secteur d’activité”.
Vous devez en outre apporter la justification de la non-matérialité aux auditeurs. Pour cela, gardez la trace des évaluations de l’analyse de double matérialité. En revanche, cette information n’est pas attendue dans le rapport de durabilité.
Rendre publique cette information peut toutefois s’avérer utile pour vos investisseurs et pour convaincre les agences de notation ESG, évitant ainsi d’être sanctionné pour une absence d’information.
Les normes ESRS 2 Gov 1 à 5 manquent d’analyses et d’explications. Devons-nous les interpréter nous-mêmes ?
L’EFRA a compilé en décembre 2024 un document de questions-réponses, qui donne des éclairages sur ces normes.
Comment les entreprises peuvent-elles intégrer la gestion de leurs obligations Règlement européen pour la protection des données (RGPD) dans leur stratégie de conformité à la CSRD ?
Le RGPD n’est pas couvert par la CSRD. Dès lors, la seule façon de l’introduire dans le rapport de durabilité est de l’intégrer à un nouveau thème, spécifique à votre entreprise. Il peut être placé en ESRS-S1 ou à la fin du rapport, dans une nouvelle section dédiée.
Une alternative est d’intégrer la protection des données personnelles de vos collaborateurs dans vos IRO, comme composante de leur sécurité. Mentionnez le alors dans le plan d’action associé. Vous pouvez également l’intégrer à l’ESRS-S4 pour la sécurité des données personnelles des clients.
Enfin, vous pouvez introduire la sécurité des données et la cybersécurité comme des éléments stratégiques dans la description de votre modèle d’affaires. Cette approche les exempte de l’analyse de matérialité.
Que pensez-vous de la charge de travail pour traiter l’ensemble des points de données pour les entreprises ?
Cette question soulève l’importance d’anticiper et, si possible, publier une Déclaration de performance extra-financière (DPEF) au format CSRD/ESRS avant d’être soumis à cette obligation. Cela permet de faire un premier exercice à blanc, de préparer les équipes et de construire une base qui servira à la rédaction du rapport de durabilité le moment venu.
Nous vous conseillons de travailler par itérations successives : rédiger les principaux contenus (données de contexte, politiques ou absence de politiques, plans d’action, indicateurs existants) ; reprendre les normes. ; ajouter les informations ou textes demandés par les points de données (DP ou Data Points) ligne à ligne.
Les normes ESRS peuvent être répétitives au sein d’un même ESRS. Selon vous, faut-il rédiger le rapport en répondant à chaque point de données individuellement ?
Non, des regroupements sont possibles pour maintenir la pertinence et la lisibilité du rapport. Veillez à rappeler précisément les nomenclatures ESRS. Cette précision facilitera l’identification des informations lors du tagging XBRL.
L’entreprise définit-elle elle-même les objectifs de maîtrise des IRO matériels ?
Oui, les objectifs sont ceux que l’entreprise s’est fixés. La CSRD n’impose pas de faire, mais de dire : c’est un exercice de transparence. Pour l’ESRS E1 sur le climat, l’objectif doit dans la mesure du possible être aligné sur la trajectoire 1,5°C de l’Accord de Paris.
Précisez, le cas échéant, si vous avez aligné vos objectifs sur des référentiels ou des règlementations externes. De plus, pour les objectifs environnementaux, vous pouvez préciser s’ils sont alignés sur des données basées sur la science (seuils écologiques par exemple).
La France a transposé la CSRD plus rapidement que d’autres pays, comme l’Espagne ou l’Allemagne. Ne créé-t-on pas ainsi une pression supplémentaire sur nos entreprises ?
Effectivement, la France est bonne élève en la matière. Nous ne nions pas la pression sur les entreprises françaises. Toutefois, cela peut jouer en leur faveur dans le cadre – par exemple – d’appels d’offres publics au niveau européen.
Curieux·se d’en savoir plus ? Retrouvez ici l’article de synthèse du webinaire ainsi que le replay.